Qualité, exigence et haut de gamme. Ce trio résume parfaitement la nouvelle édition de la Brafa – la foire des antiquaires qui se tient à Bruxelles jusqu’au 29 janvier, dans les vastes entrepôts de Tour & Taxis – et bat en brèche le discours ambiant pessimiste plombé par la crise économique.
Au fil des stands, on perçoit très bien la clientèle potentielle à travers une sélection qui renvoie une image haut de gamme et de qualité, que le président Bernard De Leye a défendue, tout en jouant la carte de l’international. La foire est devenue le rendez-vous incontournable de ce début d’année, le premier grand test pour prendre la température du marché et que certains préfèreraient à la Biennale des antiquaires ! Le soir du vernissage, des points rouges annonçaient la couleur et des promesses de vente étaient de la partie.
Une foire équilibrée
Un des points forts de la foire est d’avoir réussi à préserver un équilibre entre les spécialités, de l’archéologie à l’art moderne, en passant par la Haute Époque, le mobilier, les arts extra-européens, la bibliophilie et les bijoux. Les galeries de tableaux anciens sont moins présentes, mais la raison est très simple : la pénurie de marchandise impose aux professionnels de faire des choix, déjà sollicités par la nouvelle et brillante foire Paris Tableaux qui s’est tenue en novembre dernier à Paris, et en pleine préparation de l’indétrônable Tefaf en mars.
Stand galerie Guy Pieters, Bruxelles. De gauche à droite, George Segal, Pierre Alechinsky, Bernar Venet, Jan Fabre.
La part de l’art contemporain a été rationalisée par rapport à l’édition de 2011, pour ne pas oublier que « la Brafa est avant tout une foire d’antiquaires », comme le rappelle Bernard De Leye. Il est important de maintenir cette ouverture sans qu’elle ne prenne le pas. L’originalité reste la place dédiée aux galeries de Bande Dessinée, avec un bémol pour la galerie Petits Papiers (Bruxelles) qui semble se « pervertir » dans une telle foire en présentant essentiellement des œuvres sur toile et non des planches de BD ! Peut-être une préfiguration d’une mutation en cours de ce marché ?
À souligner également le travail des galeries autour des arts extra-européens, secteur qui partage ses lettres de noblesse entre Bruxelles et Paris, avec hommage à Jacques Germain et Patrick Didier Claes pour les pièces exposées et la mise en valeur.
Les artistes belges à l’honneur
La Brafa est toujours l’occasion de plonger au cœur de la création de ces contrées nordiques, et ce dès le XVIe siècle chez Florence de Voldère, jusqu’au XXe siècle chez Samuel Vanhoegarden. Florence de Voldère – qui crée la surprise comme toujours pour la mise en scène cette année printanière de son stand – présente quelques petits tableaux délicats, avec une attention particulière à Jacob Savery (1545-1602), pour lequel les rares tableaux vendus sur le marché ne passent que rarement en France, ou encore ce petit tondo (voir illustration principale) représentant le Printemps d’Abel Grimmer. Le cœur de la création belge mis en avant se concentre cependant sur la fin du XIXe siècle et le XXe. La Lancz Gallery a réuni des tableaux intimistes de Georges Lemmen, les travaux préparatoires pour des fresques d’Émile Fabry, des œuvres des débuts de Théo van Rysselberghe tandis que Harold T’Kint de Roodenbeke consacre presque la totalité de ses cimaises à Paul Delvaux, autour de dessins et de peintures. Côté XXe siècle, Samuel Vanhoegarden et Guy Pieters se partagent la consécration, avec les phrases masquées de Fred Eerdekens et Panaramenko pour le premier, et Jan Fabre pour le second.
L’art accessible à tous !
Bien que le niveau de la foire flirte avec l’excellence, les prix ne sont pas tous bloqués sur un curseur au-delà de six chiffres.
En bleu, l'amulette de l'oeil-oudjat montée à l'envers, Phoenix Ancient Art, Genève. Brafa 2012.
De nombreuses galeries ont joué le jeu d’ouvrir un éventail de prix assez large, avec des dessins autour de 300 euros ou les fresques de Fabry à 7000-8000 euros chez Lancz, des amulettes en faïence égyptienne dès 5 000 euros chez Phoenix Ancient Art tout comme des dessins de Craigh H. Hanna à la galerie Laurence Esnol. Un pastel de Hartung montera à 110 000 euros chez Samuel Vanhoegarden, une incroyable amphore en faïence égyptienne à 450 000 euros chez Phoenix Ancien Art et la Femme au turban de Renoir à peine plus d’un million d’euros chez Tamenaga.
Entre surprises et déceptions
Quelques perles sont à dénicher dans les 122 stands, comme ce poème Ondines de Georges Hugnet chez Martin du Louvre, le projet de musée à l’échelle 1/7 inspiré de Marcel Duchamp chez Ronny Van de Velde, les tableaux animaliers chez Philippe Heim et Marcilhac, la Nativité inspirée d’un panneau d’Hugo van der Goes (XVe siècle) chez Luc De Backker, pour n’en citer que quelques uns. Côté déception, citons les galeries qui exposent des artistes essentiellement pour afficher certains noms sans pour autant proposer des œuvres phares : le dessin de Soulages à la galerie Barès est écrasé par les œuvres sur papier majestueuses de Marfaing ou le Vuillard toujours à la même galerie qui est balayé par le tableau de Bonnard peignant la tendresse d’une grand-mère pour son petit-fils (1897, provenant de la collection Thannhauser). La galerie Harold T’Kint de Roodenbeke fait une fausse note en affichant un Spin painting de Damien Hirst, dont seul le nom répond à une promesse de médiatisation.
Étonnement à la galerie Phoenix Ancient Art, qui a réuni une collection de presque 100 pièces de faïences d’Égypte et du Proche-Orient, étudiées et publiées dans un catalogue préfacé d’Annie Caubet Conservateur général honoraire musée du Louvre (chef du département des Antiquités Orientales de 1988 à 2005). Une amulette représentant un œil-oudjat a été montée à l’envers alors que reproduite correctement dans le catalogue. Cette erreur jette un trouble malheureusement sur la démarche de la galerie qui a réuni des pièces vraiment exceptionnelles.
Les coups de cœur
Deux galeries sont toujours très attendues et ne déçoivent jamais, avec en tête la galerie Steinitz avec une scénographie qui crée toujours l’événement. La galerie Finch & Co est quant à elle égale à elle-même, que ce soit à la Brafa ou à la Biennale des antiquaires : elle transporte le visiteur dans le cabinet de curiosité d’un amateur du XVIIIe siècle, associant des objets ethnographiques à des objets d’art, proposant des rapprochements tout en finesse, et affichant toutes les précisions sur chacune des pièces, ainsi que le prix ! Ce qui dans la pratique est très rare alors que nous sommes dans une foire commerciale !
Stéphanie Pioda
Historienne de l'art et journaliste, co-fondatrice du IAD (International Art Diary)
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Informations pratiques :
Jusqu’au 29 janvier 2012.
Tour & Taxis
Avenue du Port 86 C
1000 Bruxelles - Belgique
Ouvert tous les jours de 11h à 19h. Nocturnes les mardi 24 et jeudi 26 janvier 2012 jusqu'à 22h.
Accompagnement à l'achat :
Les experts du cabinet d'expertises Authenticité sont à votre disposition pour vous conseiller lors de l'achat et la vente de vos tableaux, sculptures, meubles et objets d'art. Il seront également à votre disposition à l'occasion de la prochaine Tefaf 2012 (http://www.tefaf.com/). Pour obtenir davantage d'informations, il vous suffit de nous contacter en cliquant ICI.
Illustration principale :
Galerie Florence de Voldère : Abel Grimmer (Anvers, 1570-1610), Le Printemps, Huile sur panneau, D. 12 cm. Provenance: collection privée.