A l’origine de chaque tapisserie, il y a d’abord la commande d’un sujet, mais ensuite le talent de nombreux artistes ou artisans rentrent en jeu.
Un peintre dessine le sujet, le peintre cartonnier réalise un carton grandeur nature, un lissier de talent membre d’un atelier ou d’une manufacture tisse la tapisserie. La qualité des teintures et de la laine joue également un rôle important dans la qualité de la tapisserie. Tissés en haute ou basse lice, c'est-à-dire sur un métier placé à la vertical ou à l’horizontal, les fils de trame colorés forment le décor en passant à travers les fils de chaine tendus et unis qu’ils couvrent entièrement.
Un marché à redécouvrir
On trouve des tapisseries anciennes en vente publique pour un prix variant de quelques milliers d’euros (de 1.500 à 3.000 euros pour une charmante verdure d’Aubusson) à une ou à plusieurs centaines de milliers d’euros pour les pièces très exceptionnelles, comme la tapisserie de l’Audience du Prince de l’Histoire de l’Empereur de Chine ou Première Tenture Chinoise tissée à la Manufacture Royale de Beauvais au XVIIIe siècle adjugée 350.000 euros en 2006 chez Beaussant Lefèvre. Il est ainsi possible d’acquérir une tapisserie tissée d’après le dessin d’un peintre célèbre pour un prix bien plus modique qu’un tableau de ce même peintre.
Conseils pour bien acheter une tapisserie ancienne
Ancienne bordure de tapisserie datant du XVIIe. Copyright Delorme Collin du Bocage.
Avant d’acquérir une tapisserie, il faut prêter attention à son état de conservation, critère essentiel dans la valeur de la pièce. Il faut ainsi vérifier:
- Si la tapisserie est entière ou non, si ses bordures sont d’origine ou rapportées
- Si la tapisserie est en bon état général, ou si elle comporte beaucoup de parties restaurées ou de patchs
- Si elle n’est pas rentrayée, c'est-à-dire coupée et ensuite recousue. C’était souvent le cas au 19è siècle où les tapisseries anciennes étaient utilisées comme de la tenture murale et étaient coupées pour le passage d’une porte, d’une fenêtre ou d’une cheminée.
- Si la tapisserie n’a pas de partie repeinte, regardez en particulier les parties brunes ou noires souvent plus usées.
- Les parties en soies les plus claires sont elles «cuites» ou désagrégées ?
Grattez avec l’ongle et constatez si vous avez de la poudre claire sur le doigt.
- Si la tapisserie n’a pas été retournée car elle était trop passée, c'est-à-dire si les fils de l’envers plus vifs et frais ont été repassés sur l’endroit. Les coloris sur l’endroit sont alors très vifs et frais mais présente une boursouflure. Cela est rare, car cela prend beaucoup de temps.
La question du faux
Il existe heureusement peu de faux en tapisserie, car cela serait en effet trop coûteux. On rencontre cependant des tapisseries de style, tissées également à la main au XIXe et XXe siècle à l’imitation de modèles plus anciens, mais avec des teintures synthétiques résistants beaucoup moins bien à la lumière : le traitement des personnages est raide, les dimensions des tapisseries plus petites et les couleurs souvent très passées. Il existe aussi les tapisseries Jacquard, c'est-à-dire mécaniques.
Les critères de qualité
L’ancienneté de la tapisserie, mais également sa rareté jouent également un rôle important dans sa valeur. Les tapisseries Millefleurs de la fin du XVe siècle ou les Feuilles de Choux ou Aristoloches de la seconde moitié du XVIe siècle sont recherchées et rares, comme les tapisseries à personnages de cette époque tissées à Arras ou Tournai.
Tapisserie en laine et soie représentant le mois de Février, milieu du XVIIe siècle. Copyright Couteau Begarie.
Les tapisseries anciennes exceptionnelles tissées aux Gobelins, Beauvais ou Bruxelles sont évidemment recherchées de par la finesse et la qualité de leur tissage et de leurs coloris. Beaucoup sont conservées dans les collections publiques françaises (Musée du Louvre, Musée des Arts Décoratifs, Mobilier National, Musée de Cluny, Musée d’Ecouen, Château de Pau, Musée de St Lo…) et étrangères.
Les sujets avec des personnages sont également prisés et auront plus de valeur qu’une verdure des Flandres ou d’Aubusson, mais des dimensions trop grandes peuvent rendre la tapisserie difficile à placer dans les intérieurs et donc plus difficilement vendable. Une scène de bataille ou une scène religieuse sera moins « commerciale » qu’une scène plus plaisante, décorative ou historique, comme l’Histoire du Roy ou les Chasses de Louis XV tissées à la Manufacture Royale des Gobelins ou la Tenture Chinoise ou la Tenture des Grotesques à fond jaune… tissées à Beauvais.
Dernier conseil : il vaut parfois mieux acheter un fragment de tapisserie au sujet rare ou exceptionnel, de qualité, aux coloris vifs et frais, finement tissée, qu’une tapisserie complète au sujet peu commercial ou en mauvais état.
Florence VIZET
Spécialiste-expert de tapisseries anciennes et tapis anciens
Quinze ans d’expérience à la Galerie Chevalier aux cotés de Dominique Chevalier et Nicole de PAZZIS-CHEVALIER
Travaille maintenant à l’IESA au sein du Département Marché de l’Art
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